Et j’écris dans ce désordre

Revue Europe, 2021

in Revue Europe, n°1103

… À la fin de sa vie, Genet a répété qu’il avait besoin de la prison pour écrire ses livres. On sait comme il était un naturel menteur et pouvait dire le contraire de ce qui lui semblait devenu légende. Peu importe. Laissons-le à la légende qu’il s’est inventée et dont on a retissé celle qu’on a faite de lui pour paraître devant nous. Légende où il doit entrer un peu de vrai, comme toujours, quand il confie à François Sentein, le petit Franz : « Je n’écris plus rien. Ça me dégoûte. J’écrirai quand je serai en tôle. » Puis une fois en prison : « Mon intention est de travailler dur, et de terminer ici mon roman. » Soyons complices, croyons-le quand il mentira plus beau dans sa vieillesse et devant la caméra ou les journalistes. Croyons-le même s’il ne dit pas une vérité très exacte, même s’il s’était plaint au petit Franz : « Ici la vie n’est pas si drôle qu’on le croit communément chez vous. J’en suis à ma 3ème bagarre. Et j’écris dans ce désordre, mes papiers chamboulés toutes les demi-heures, quand ce n’est pas pour des fouilles c’est par des types qui se tabassent ! Ce n’est plus tenable », ou encore : « Et l’emmerdement d’une cellule où tous les gonzes sont idiots, et pis », « Que de cons en cabane, ô mon honnête ami ! », et il est vrai que la connerie empêche plus de se concentrer que le chahut…